TERRITOIRE ET SANTÉ N°11 - OCCITANIE

L’Occitanie redessine les frontières public-privé

Il est communément admis que les établissements privés représentent une part importante de l’activité de chirurgie, à l’inverse du secteur public qui propose globalement une offre de proximité tournée vers l’activité de médecine. La région Occitanie vient pourtant bouleverser ce paradigme en faisant figure d’exception. D’une part, elle est l’une des deux seules régions françaises, avec la Corse, pour laquelle le poids du privé dans les prises en charge de médecine et d’obstétrique est quasi égal à celui du secteur public (hors séances de chimio et radiothérapie). D’autre part, la réponse aux besoins de proximité des établissements privés de la région y est la plus marquée.

Urgences privées :Dans les autres régions, les ratios d’activité se situent aux alentours de 22 % de l’activité de médecine pour le secteur privé contre 78 % pour le public, et de 25 % de l’activité d’obstétrique pour le privé contre 75 % pour le public.
En Occitanie, la répartition de l’activité est beaucoup plus favorable au secteur privé. Ce dernier réalise environ 40 % de l’activité de médecine et plus de 45 % de l’obstétrique. Faut-il y voir un déficit d’offre de soins publique ou une omniprésence d’offre privée ? Rien n’est moins sûr concernant l’une ou l’autre des hypothèses.
Une des pistes réside certainement dans le maillage des services d’urgence sur le territoire. En effet la place des services d’urgences privés y est plus importante qu’ailleurs : le privé prend en charge 22 % des séjours arrivant par les urgences contre 7 % en moyenne en France.

Singularité : Autre phénomène marquant, la réponse aux besoins de la population par chacun des établissements montre également une situation paradoxale. La majeure partie des établissements privés disposent de meilleurs parts de marché sur leurs bassins de proximité que leurs homologues publics, ces derniers ayant plutôt tendance à capter des patients au-delà de leurs frontières naturelles de recrutement.
On pourrait imputer ce phénomène à la présence de services d’urgences dans les établissements privés ou encore à l’existence de « gros » CHU proposant une offre de recours régionale. Cependant cette explication n’est que partielle, les établissements publics disposant également deservices d’urgences et l’offre de recours ne concernant qu’une part marginale de l’activité des CHU.

L’Occitanie est ainsi relativement singulière dans le paysage sanitaire français, tant d’un point de vue de la répartition de l’activité que du
« rayonnement géographique » de recrutement des établissements de la région. On y observe en effet de nettes disparités face au reste de la France.
Cette répartition en Occitanie représente- t-elle une menace pour le secteur public ou offre-t-elle, au contraire, une piste de réflexion pour l’élaboration de nouvelles stratégies de planification sanitaire entre le public et le privé ? Ce modèle se joue-t-il au bénéfice de l’efficience de l’organisation et des contraintes médico-économiques de ces deux secteurs, mais surtout des patients Autrement dit, est-il possible d’envisager à l’avenir une offre privée répondant à des besoins locaux, traités localement, et une offre publique répondant à des besoins locaux, traités en région ?

Nicolas Staelen - Directeur Associé d'Altense