Territoire et santé n°9 - Bretagne

Quelle stratégie pour les établissements isolés ?

Après de longues discussions entre le centre hospitalier (CH) de Pontivy et l’Agence régionale de santé – qui souhaitait initialement rattacher ce dernier au CH de Lorient –, un GHT Centre-Bretagne a finalement vu le jour, composé du CH Centre-Bretagne, du CH de Guémené-sur-Scorff et de la Maison d'accueil spécialisée (Mas) de Guémené-sur-Scorff.
Situé au coeur de la Bretagne, entouré par six hôpitaux de plus de 40 000 séjours MCO, le premier enjeu du GHT Centre-Bretagne sera de proposer une offre de soins de proximité cohérente pour contenir les fuites de sa zone de chalandise.
Aujourd’hui, les patients quittant le bassin de Pontivy-Loudéac pour se faire soigner sont nombreux :
- médecine : 35,27 %,
- chirurgie : 44,92 %,
- obstétrique : 38,22 %.

Ces taux de fuites peuvent atteindre jusqu’à 60 % en gynécologie, 65 % en traumatologie et 95 % pour les cathétérismes vasculaires diagnostics et interventionnels. Pour endiguer ce phénomène, deux pistes peuvent être envisagées :
- renforcer les synergies entre les deux établissements du GHT, notamment en structurant une réelle filière MCO-SSR. En effet, si le CH de Guémené est le premier SSR de destination des patients de Pontivy (hors adressages internes), il ne lui adresse que 30 % de ses patients,
- développer un partenariat avec les acteurs privés, dont la polyclinique de Kério, troisième acteur important du bassin avec 18 % de parts de marché en médecine et chirurgie.

Ce travail devra s’accompagner en parallèle d’une intensification des coopérations avec l’ensemble des grands centres bretons pour les activités de recours.
En effet, loin de se tourner uniquement vers Lorient, les patients de Pontivy-Loudéac sont aujourd’hui pris en charge de façon homogène entre l’ensemble des établissements importants de la région : 13 % des fuites sont prises en charge au CH de Saint-Brieuc, 12 % au Centre hospitalier Bretagne-Atlantique de Vannes et 9 % au CH de Lorient comme au CHU de Rennes.

Cet exemple illustre la problématique rencontrée par les GHT éloignés des grands centres urbains. La nécessaire volonté de maintenir une offre locale sur les territoires « isolés » est-elle pertinente au regard des modes de consommation vers les pôles d’attractivités qui tend à augmenter ? Et comment gérer cette apparente « concurrence » entre GHT ?
Bien avant les GHT, la question s’était déjà posée en Bretagne avec la maternité de Carhaix dont le rapprochement avec le CHU de Brest a été acté. Il n’en reste pas moins qu’aujourd’hui la moitié des parturientes du bassin de Carhaix ne choisissent pas la maternité de Carhaix pour leur accouchement.

Preuve en est que malgré des décisions stratégiques de planification sanitaire, ce sont avant tout les patients eux-mêmes qui restent maîtres du devenir des établissements.

Nicolas Staelen - Directeur Associé d'Altense